Eléments de programme pour un futur Conseil National de la Résistance français (CNRF)
Jean-Paul Baquiast, Christophe Jacquemin 07/09/2015
Se sont associés aux signataires, par ordre d'arrivée:
Alain Cardon, professeur des Universités en informatique
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NB. projet en discussion. Commentaires, propositions et critiques seront reçus sous la version du texte publiée par Overblog,
Introduction
Nous avons évoqué dans des articles précédents l'hypothèse selon laquelle Jeremy Corbyn, appelé au pouvoir par un électorat britannique excédé des impasses du néo-libéralisme, mettrait en œuvre un programme s'inspirant de celui du Labour party des origines. Il serait intéressant ici d'imaginer ce que pourrait être ce programme. Mais il serait encore plus intéressant d'imaginer ce que pourrait être l'équivalent d'un tel programme, s'il se trouvait en France une majorité suffisante pour le proposer.
Il est tentant de dire que ce programme pourrait s'inspirer de celui proposé sous l'occupation allemande et après la Libération par le Conseil National de la Résistance. Celui-ci avait été conçu par des militants de diverses origines, parti communiste, parti socialiste mais aussi une forte proportion de démocrates chrétiens, selon le nom qui était le leur à l'époque. Son ambition était d'être adopté par des mouvements refusant le retour au capitalisme de pur profit qui avait réussi avant la guerre à provoquer la chute des gouvernements de Front Populaire, et qui s'était fort bien accompagné par le suite de l'occupation nazie.
Après presque un siècle cependant, si aujourd'hui les objectifs politiques et sociaux du CNR demeurent plus que jamais d'actualité, les mesures concrètes proposées (d'ailleurs imparfaitement appliquées à la Libération) demandent une importante actualisation. C'est ce à quoi s'efforce ce texte. Ici le terme de Résistance pourrait être entendu comme désignant la résistance à une finance se disant transnationale mais demeurant très largement inspirée par les objectifs géopolitiques des Etats-Unis.
Le FMI et la Banque mondiale sont directement au service de cette finance. Malheureusement, rompre avec Wall Street, comme le proclamait le mouvement Occupy Wall Street, ne peut se faire pour les européens sans rompre avec la monnaie unique européenne et plus généralement avec les institutions de l'Union définies par les traités actuels. Autrement dit, il faut imaginer comment un Conseil National de la Résistance français (CNRF), adapté aux éxigences du 21e siècle, pourrait permettre à un pays comme la France de vivre et même prospérer en tant qu'Etat-nation. Un tel Etat ne romprait évidemment pas ses liens avec les Etats restés membres de l'Union européenne, mais il les définirait d'une façon tenant mieux compte de ses intérêts civiilisationnels propres.
L'hypothèse d'une sortie de l'euro et de l'Union n'est évidemment pas utopique pour la France, puisqu'elle avait été envisagée avec beaucoup de crédibilité pour la Grèce, pays disposant pourtant d'infiniment moins de ressources que la France. Renvoyons le lecteur à ce propos aux analyses formulées à l'époque par l'économiste Jacques Sapir, qui avaient en partie inspiré Yannis Varoufakis.
Pour préciser ce que pourraient les éléments de programme d'un futur CNRF, nous examinerons dans une première partie ce que devrait être sa philosophie économique et sociale, puis dans une seconde partie certains des changements institutionnels permettant de dépasser les freins actuels à la créativité
Première partie Un CNR français. Philosophie économique et sociale
1.1. Contraintes externes à prendre en compte
Il ne sert à rien d'émettre des propositions tirées de rêves sur la comète. Celles ci doivent tenir compte des contraintes incontournables, certaines dramatiques, qui s'imposeront au monde dans les prochaines décennies. Nous les avons souvent décrites sur ce site. Bornons nous à les rappeler en quelques mots.
- Le réchauffement climatique rendant certaines parties de la planète inhabitables et provoquant des déplacements de populations considérables, y compris entre pays dits riches
.- L'appauvrissement continu des écosystèmes et de leurs ressources résultant d'une surexploitation imposée non seulement par l'accroissement des populations, mais par le refus d'imposer les normes de protection qui seraient indispensables à la survie de ces ressources. Le cas le plus évident en ce domaine est celui des ressources océanographiques
.- La raréfaction croissante des réserves énergétiques et en matière première de la Terre, tenant là aussi à leur exploitation sans précautions. L'appel aux nouvelles sciences pourra y suppléer mais le recours à celles-ci sera limité par leurs coûts.
- L'accroissement continu de la population. Freiné dans les régions ayant atteint la transition démographique, il ne sera pas contrôlable avant des décennies (compte tenu de l'hystérésis caractérisant ces phénomènes) dans certains pays asiatique et surtout en Afrique, dont la population pourrait atteindre 4 milliard dans un siècle.
- Le maintien, sinon le renforcement, d'une inégalité globale entre les pays dits riches -parmi lesquels se trouve l'Europe - et les pays dits pauvres. Cette inégalité se complète, y compris dans les pays riches, d'une inégalité considérable entre le 1% des élites favorisées et les 99% du reste de la population. Nécessairement, avec le développement de l'information, ces inégalités seront de moins en moins bien supportées. En résulteront des conflits parfois violents, précédés si rien n'est fait de migrations de grande ampleur..
- Le développement, dans les pays riches mais aussi de plus en plus dans les pays pauvres, de technologies numériques et robotiques. Celles-ci procureront un grand nombre de nouveaux services les rendant indispensables. Mais elles se substitueront inévitablement aux forces de travail traditionnelles. Le mouvement se fera en premier au profit des pays et des firmes ayant acquis la maitrise de ces technologies, c'est-à-dire les Etats-Unis, suivis de loin par certains Etats européens et par la Chine. D'autres régions du monde en resteront longtemps dépourvues.
1.2.Objectif premier: faire disparaître le chômage grâce à une innovation systématique et tout asimut.
Les contraintes précédemment énumérées se traduisent pour les sociétés n'ayant pas su maitriser les aspects favorables de ces contraintes, par un sous-investissement, un sous-emploi de l'ensemble des forces de travail intellectuelles et manuelles, une dépendance croissante à l'égard des pays ayant mieux su tirer parti des opportunités technologiques favorables ou disposant de ressources naturelles plus importantes. Elles supportent donc de plein fouet les conséquences destructrices de ces contraintes.
Les pays européens, l'Allemagne en grande partie exceptée, quoique relativement favorisés au regard des pays pauvres, n'ont généralement pas pu ou su utiliser les potentialités offertes par les nouvelles sciences et technologies pour se développer dans tous les domaines qui étaient théoriquement à leur portée. C'est très largement le cas de la France.
La France dispose de ressources indiscutables sur lesquelles nous reviendrons (annexe 1). Mais elle souffre de maux également indiscutables. Parmi ceux-ci se trouve un sous-emploi généralisé des forces de travail, physique et intellectuel. C'est à ce mal qu'il convient en premier lieu de porter remède. Cependant, des incantations ne suffiront pas. Il faudra pour cela transformer radicalement les objectifs que se donnerait une société comme la France, s'appuyant sur son héritage politique, scientifique et industriel.
Dans ce sens, il convient de réfléchir à l'exemple américain, non pas pour s'en inspirer mais au contraire pour ne pas le suivre. Les Etats-Unis, confrontés à ce qui est présenté aujourd'hui comme le plus grand cataclysme de son histoire, la crise de 1929, n'avaient pas trouvé mieux, pour retrouver le plein emploi de leurs ressources, qu'entreprendre des guerres mondiales. La participation décidée par Roosevelt à celle menée contre Hitler était parfaitement justifiée au plan moral, mais Hitler vaincu, l'Amérique avait du chercher à réutiliser les ressources mobilisées, pour éviter de retomber dans une nouvelle Dépression.
A cette fin, les gouvernements n'avaient rien imaginé d'autre que porter de nouvelles guerres dans diverses parties du monde, en s'engageant dans de nouvelles dépenses considérables. L'essentiel de ces dépenses intéressait le domaine militaire. Grâce à ces dépenses, financées par l'emprunt, l'Amérique avait réussi à éviter un retour massif du chômage. Mais les guerres, même destinées à s'emparer des ressources d'autres peuples, n'ont finalement que peu de retombées constructives. Aujourd'hui, si l'Amérique dispose de technologies de sécurité et de défense hors pair, elle n'a pas su tirer de celles-ci toutes les applications tournées vers les besoins en profondeur de la société, qui étaient à sa portée. Elle est constamment menacée d'un retour de la crise économique. Elle réagit mal, e termes politiques, à l'immigration sud-américaine.
En 1946 et plus encore par la suite, l'imagination et les compétences ont manqué aux décideurs, décideurs politiques ou décideurs constituant le puissant lobby militaro-industriel. Ils n'ont pas su imaginer une mobilisation toute différente, au service d'objectifs scientifiques et industriels pacifiques, pouvant bénéficier non seulement aux citoyens américains, mais au reste du monde. En particulier, le lobby est resté militaro-industriel au lieu de se transformer en lobby pacifico-industriel. On peut rêver à ce que serait aujourd'hui le monde si l'Amérique et plus généralement les puissances victorieuses s'étaient inspirées des idées défendues en petit comité par Einstein ou par les pères de la physique quantique.
C'est à l'échelle de la France, et 70 ans après, l'erreur qu'il ne faudrait pas renouveler. La France doit mobiliser ses ressources au service du développement de sciences et de technologies radicalement nouvelles, ce que l'Amérique n'avait pas su faire en 1938 et en 1946, ce que d'ailleurs elle ne sait toujours pas faire en profondeur. Nous présenterons en annexe quelques unes de ces sciences et technologies et leurs applications souhaitables ( annexe 2). Pour indiquer d'emblée qu'elles ne devront pas être limitées par le manque d'imagination créatrice, nous reprendrons, en l'explicitant, le terme de transition vers le post-humain.
1.3. Viser au delà du plein-emploi des hommes.
Nous voulons dire par là que le CNRF ne devra pas se limiter à créer des emplois aidés ou autres formules sans perspectives. Il lui faudra concevoir et mettre en place des objectifs véritablement révolutionnaires, tels que l'avènement du post-humain mentionné ci-dessus.. Le lecteur jugera sans doute qu'il s'agit d'utopies, mais souvent dans l'Histoire ce furent les utopies qui ont fait les grands peuples.
- Redéfinir le plein-emploi. Le plein emploi, au sens noble du terme, ne doit pas viser à donner à tous une occupation, quelle que soit celle-ci, et même s'il s'agit d'emplois subalternes. Cet objectif déjà loin d'être atteint en France, devra être complété par de plus grandes ambitions. La société devra se fixer des objectifs si exigeants que les ressources humaines existantes ne suffiraient pas à les satisfaire. Pour y réussir, plutôt que faire appel à l'immigration qualifiée, comme aujourd'hui l'Allemagne, il faudra former les forces de travail nationales pour qu'elles fassent face aux tâches les plus difficiles, en formation initiale d'abord, en cours de carrière ensuite, comme précisé ci-dessous. La France dispose de sources quasiment illimitées de matière grise disponible, qu'elle ne sait pas valoriser.
Cette redéfinition du plein-emploi, et son application systématique, devrait aujourd'hui constituer le facteur essentiel dans ce que l'on appelle la crise des banlieux. Elle devrait permettre aussi d'absorber une grande partie des apports de l'immigration.
- Qu'entendre par objectifs ambitieux? Résumons les en une formule: devenir le laboratoire d'essais du monde (ou l'un des premiers d'entre eux). La Chine a longtemps été l'usine du monde, appliquant les idées imaginées par d'autres. La France doit avoir l'ambition de suggérer des objectifs scientifiques et technologiques que n'auraient pas les autres pays, et de les mettre à l'essai pour tester leur faisabilité et leur intérêt. Nous en proposons une liste en annexe 2 précitée. Pour cela elle devra viser à devenir le laboratoire du monde. Certes dans cette voie elle serait vite rejointe pas d'autres, mais elle aurait l'avantage d'avoir eu les bonnes idées en premier.
- Former chaque citoyen-ne. pour ce faire. Il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. Il faut se donner les formations et les compétences nécessaires, en utilisant chaque fois que possible les technologies numériques. Pour devenir le laboratoire d'essais du monde il faudra faire appel à toutes les capacités d'imagination et d'invention disponible, en France comme dans le reste du monde. Il faudra donc mettre en place des formations initiales et des formations continues qui devront viser l'excellence. Chacun devra pouvoir en être le bénéficiaire, mais chcun devra en contrepartie mobiliser toutes les capacités que lui auront données la nature et le milieu social.
- Assurer à chacun un plein emploi, dans le cadre de ce laboratoire, adapté en permanence aux capacités qu'il aura acquises. Ces emplois devront être suffisamment ambitieux pour que chacun y trouve une place, en mobilisant et développant ses compétences. L'emploi ne se limitera pas à ce que l'on nomme aujourd'hui les années actives, mais devra se poursuivre, en fonction des capacités physiques des individus, jusqu'à leur extrème vieillesse.
- Assurer à chacun un salaire et une couverture sociale de base, indépendants du rôle et de l'emploi qui seront les siens dans ce laboratoire. Ceci veut dire que ce ne sera plus la peur du chômage et de la perte de sa couverture sociale qui devront pousser les individus à travailler, mais le goût du travail. La société devra assurer à chacun les garanties et services d'un Etat-providence universel tel qu'imaginé en France par le premier CNR, et partiellement réalisé à la Libération. Autrement dit, les individus travailleraient, non pas pour assurer leur vie matérielle, mais pour mettre en valeur leurs capacités et leurs idées. En contrepartie, les revenus du travail dépassant certains plafonds, qui ne profitent qu'à des minorités n'étant pas nécessairement les plus productives, seront découragés
- Instituer à divers niveaux les appels à idées que le laboratoire se donnera pour mission de mettre à l'essai puis de développer en cas de succès. La société nouvelle à créer, les sciences et technologies nécessaires, les bons emplois qui en seront faits ne sortiront pas tout armés des cerveaux des gens. Il faudra que se mette en place de véritables « machines à inventer », organisées sur un mode professionnel, et utilisant les meilleurs outils d'aide à la décision disponibles.Certaines entreprises ont déjà développé de telles machines, mais en les limitant à la recherche d'objectifs soit ludiques, soit visant un profit corporatif immédiat.
- Définir sur ces bases des projets de développement à la fois ambitieux et cohérents, tant en interne qu'au profit des autres projets. Citons ici les énergies non polluantes, l'agriculture raisonnée (respectueuse de la terre), la médecine raisonnée (respectueuse du patient), des cycles de production raisonnés (qui évitent le plus possible le consumérisme pour le simple profit (les produits à obsolescence programmée et le pillage de la planète), la création d'outils permettant de réduire les dégâts fait à l'environnement, etc...Mentionnons ici les sciences humaines mises à la portée de tous, (avec une réflexion sur ce que signifie vivre sur cette terre.
Nous dévelooperons ces thèmes et en proposerons d'autres en annexe 2.
- Donner dans la mesure du possible des suites industrielles, économiques et sociales à ces projets. Il ne suffira pas évidemment de se borner à suggérer de bonnes idées, pour que seuls les autres pays en tirent partie. Il faudra créer les entreprises technologiquement capables de passer de la recherche à l'application de grande échelle sur le terrain. Les entreprises privées, y compris coopératives, seront appelées à le faire. Mais pour donner l'exemple, des entreprises et services publics scientifiques, sociaux, industriels et commerciaux devront être mis en place et pourvus des meilleurs moyens disponibles.
- Décourager en contrepartie les types de consommation gaspilleuses de ressources, imposant des importations importantes et détournant les citoyens de priorités plus nobles (cf ci-dessus) Certains décisions réglementaires devront être prises à cette fin, mais elles devront être très largement accompagnées d'un effort collectif de conviction montrant aux individus qu'ils ont mieux à faire que rechercher de petits plaisirs égoïstes dans une consommation largement promotionnée par la publicité. Tout à l'inverse, les activités intellectuelles et physiques contribuant au développement des personnes devront être encouragées.
Un très grand problème demeurera cependant, auquel il reste difficile de suggérer des remèdes efficaces.Il s'agit de l'addiction à des excitants, stupéfiants et autres produits de la chimie de synthèse, qui s'emparera toujours, semble-t-il, d'un certain nombre de personnes fragiles. Encore faudra-t-il lutter plus énergiquement qu'à présent contre les intérêts mafieux qui en assurent la diffusion, notamment aujourd'hui par Internet.
- Nous reviendrons ci-dessous sur la question des moyens et plus particulièrement des budgets nécessaires à de tels investissements. Disons seulement ici qu'en complément de ressources fournies par l'impôt, l'émission de monnaie et autres sources, il faudra aussi faire appel à l'épargne des particuliers. La formule des obligations à durée indéterminée (ODI), déjà proposée sur ce site par Joseph Leddet, paraît offrir des solutions très intéressantes.
Deuxième partie. Changements institutionnels permettant de dépasser les freins à la créativité.
Le cadre général censé jusqu'ici permettre à un pays comme la France de se développer lui a été imposé par les forces libérales et néo-libérales ( la « Finance »). Il se résume en un terme, la mondialisation. S'ouvrir le plus largement possible à la mondialisation et au marché devrai prétend-on permettre à la France de sortir de son état actuel de stagnation. Or, il a été largement montré par les économistes et politologues indépendants que cette ouverture signifie au contraire la disparition progressive des atouts dont dispose encore la nation. Ceux ci se trouvent en effet confrontés dans le cadre de la mondialisation à des forces contre lesquelles, dans leur état acuel, ils ne sont pas de force à lutter: le grand capital anglo-saxon, bientôt peut-être relayé par le capitalisme d'état chinois, d'une part, la concurrence sans lois et sans limites des pays à forte population misérable, supportant pour survivre des conditions de travail qui seraient insupportables en Europe, d'autre part.
Il faudra donc en France accepter de revenir à des modes d'organisation ayant permis à la Libération de reconstruire le pays: une économie très largement dirigée, des protections aux frontières très fortes. Mais pour tenir compte des erreurs passées, ce « dirigisme » et cette protection devront être repensés pour intégrer des méthodes modernes de direction expérimentées dans un certain nombre de groupes mondiaux innovants, tout en leur retirant leur orientation exclusivement destinée à maximiser le profit de l'actionnariat des dits groupes. Que pourraient être en conséquences les objectifs et les méthodes que se donnerait le CNRF étudié ici?
2.1. Modifier en tant que de besoin le cadre juridique actuel. Celui-ci, très vieilli, se montre aujourd'hui plus riche en incitations à ne rien faire qu'en incitations à faire. Tout évidemment ne devra pas être remplacé, mais il faudra imaginer des réformes en profondeur, dans de nombreux domaines, qui apparaitront comme dangereusement révolutionnaires aux esprits conservateurs. Ces modifications imposeront en interne une remise en cause du droit de propriété, notamment en ce qui concerne les entreprises. Au plan externe, relevant du droit européen et du droit international, les mêmes remises en cause s'imposeront, aussi largement que nécessaire. Nous y reviendrons.
2.2. Nationaliser en tant que de besoin, les entreprises nécessaires au développement de ces projets, si elles refusaient de s'y associer. Parmi celles-ci, on citera les banques et un certain nombre d'entreprises dites du CAC 40. Le terme de nationalisation suscite l 'horreur, non seulement des intérêts privés concernés, mais aussi de l'opinion. On évoque à ce sujet les échecs rencontrées par les nationalisions en URSS et ailleurs. Pourtant, pour combattre la crise de 2008, la Finlande avait nationalisé un moment ses banques, sans difficultés particulières. Si des fuites à l'étranger en résultent, tant pis. Des forces nationales prendront le relai, dans l'esprit remarquablement illustré par la poésie de Victor Hugo « ô soldats de l'An deux » http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/victor_hugo/soldats_de_l_an_deux.html.
2.3. Définir le statut interne de ces entreprises nationalisées afin de les rendre plus efficaces que celles qu'elles auront remplacées. Il ne s'agira pas, en dehors de la propriété du capital, de chasser tous les états-majors et cadres concernés, pour les remplacer par des fonctionnaires ou personnels promus par le gouvernement du moment. Il faudra assurer au contraire à ces cadres une place de choix, dès lors qu'ils accepteront de mettre leurs capacités au service du vaste laboratoire d'innovations à créer. Dès lors aussi qu'ils accepteront, dans les entreprises nationalisées, les limitations de salaires évoquées plus haut. Une échelle de 5 en ce qui concerne les niveaux de rémunérations et prestations annexes serait suffisante, et finalement très convenable.
2.4. Organiser au niveau national, comme au niveau des branches ou de secteurs horizontaux, la planification des actions nécessaires à l'émergence des idées comme au développement des moyens nécessaires à faire du pays le laboratoire évoqué ci-dessus. La France a perdu la pratique des Commissariats au plan et des Plans de développement et de modernisation institués à la Libération. Contrairement à ce qui en avait été dit, il ne s'agissait pas principalement de structures administratives et politiques stérilisantes. Elles faisaient un large appel à ce que l'on nommait les « forces vives » de la nation. Des structures de même type devront être mises en place.
2.5. Repenser en conséquence le rôle et la composition du gouvernement, en tant que responsable de la proposition des mesures à prendre et de mise en place des administrations permettant de les appliquer. Les autres pouvoirs constitutionnels, Parlement et Judiciaire, devront être adaptés parallèlement. Par ailleurs les objectifs et méthode de la décentralisation devront être modifiés, afin que celle-ci se mette au service des innovations et cessent de soutenir des intérêts particuliers constituant des freins à la politique générale de changement qui sera mise en œuvre.
2.6. Recréer une fonction publique, en priorité au niveau de l'Etat, qui retrouvera là encore le rôle essentiel qu'elle avait joué en France après la guerre et au début du gaullisme. Ceci signifiera, quel qu'en soit le coût, renforcer ses effectifs actuels, notamment dans les services indispensables à l'encadrement et au contrôle des activités proposées ici. Ces services seront notamment en charge de la planification et de l'évaluation des résultats, mais aussi et surtout des tâches de contrôle fiscal et contrôle de l'application des réglementations, systématiquement dépourvues d'effectifs aujourd'hui. On y ajoutera la police et la douane indispensables à la lutte contre les mafias qui prolifèrent partout dans le monde actuellement.
On y ajoutera aussi la défense nationale sous ses diverses formes. L'armée servira à protéger le pays des agressions extérieures, protection d'autant plus nécessaire qu'il s'engagera dans les tâches évoquées ci-dessus. Ceci ne manquera pas de lui susciter l'opposition armée des groupes d'intérêts internationaux s'estimant frustrés. Les tentatives de changement de régime (regime change) à partir de soulèvements populaires artificiellement provoqués par des Agences spécialsée, ne manqueront pas. Les Etats-Unis y font encore largement appel.
Les méthodes traditionnelles de recrutement, formation et gestion de cette fonction publique renforcée devront être modernisées pour tenir compte des nouveaux rôles qui lui seront donnés.
2.7. Lever le handicap prétendu du manque de moyens, budgétaires notamment. La question essentielle des ressources devra être abordée à partir d'approches qui, sans être à proprement parler révolutionnaires, devront bousculer les faux impératifs visant à paralyser les initiatives créatrices susceptibles de remettre en cause l'ordre établi. Le premier point consistera à se débarasser du fardeau de la dette. Un Etat ayant repris son autonomie par rapport à l'Union européenne devra plus facilement négocier et restructurer sa dette. Celles jugées légitimes seront remboursées, quite à être mieux réparties dans le temps. Celles imposées par des engagements spéculatifs pris précédemment par des intérêts financiers souvent extérieurs aux administrations budgétaires, seront dénoncées unilatéralement, quelles qu'en soient les conséquences.
Pour l'avenir, l''obligation de respecter des équilibres budgétaires calculés au niveau le plus bas et de fait injustifiés sera modulée selon les secteurs. Dans les domaines où existent des ressources considérables restant sous-employées. il faudra faire ce qu'ont toujours fait les pays en état de guerre, et ce que font encore les Etats-Unis, dans le type de guerre qu'ils mènent contre le reste du monde. Il s'agira dans un premier temps, de créer de la monnaie sous diverses formes, qui servira de moyens de paiement temporaire interne pour financer les investissements et salaires à consentir. Cette monnaie ne sera convertible que sous le contrôle des autorités en charge du secteur financier.
Dans un second temps, il faudra valoriser de différentes façons les investissements ainsi réalisés. Cette valorisation permettra de « rembourser » les créations de monnaie précédemment faites, et de financer de nouveaux investissements. Le cycle ne peut évidemment se dérouler en une seule année. Il doit être assurée sur des durées plus longues, différentes selon les domaines considérés.
2.8. Protéger par diverses méthodes les efforts en cours puis les résultats obtenus. Ceci signifiera la mise en place initiale d'un développement en autarcie partielle, c'est-à-dire vivant au maximum en circuit fermé, à partir de ses propres ressources. Pour un pays comme la France, ces ressources sont insuffisantes pour éviter de faire appel aux importations, compensées par des exportations. Il faudra donc organiser, dans le cadre de l'économie dirigée, les circuits nécessaires en ce sens. Le principe en sera l'établissement de relations gagnantes-gagnantes avec les autres pays partenaires. Les relations avec les Brics ouvriront de larges perspectives à cet égard, pour peu que l'on accepte de s'affranchir des "sanctions" et interdits imposés à l'Europe par les Etats-Unis.
Pour éviter que des fuites diverses, souvent criminelles (mafieuses) ne se produisent, un contrôle des changes sera indispensable, complété d'un contrôle des flux de marchandises. Il sera par contre nécessaire, malgré les risques, de laisser s'organiser librement les échanges en matière de personnes physiques, tant du moins que ceux-ci ne serviront pas d''instrument aux activités criminelles.
Troisième partie La question de l'euro et celle de l'Union européenne
Nous ne détaillerons pas ici les solutions proposées par ceux désirant s'affranchir des contraintes devenues insupportables découlant de la participation à la monnaie unique et à l'Union sous sa forme actuelle. Elles n'auront rien d'original au regard de celles déjà largement discutées en Europe. Disons seulement que le CNRF envisagé ici se donnera une monnaie qui, sans doute sous le nom conservé de Franc, n'aura rien de comparable à l'euro actuel ni à l'ancien franc. Il s'agira d'une monnaie très largement administrée pae une Banque centrale nationale et nationalisée, au sein des frontières et des missions évoquées ci-dessus. Concernant les relations avec les autres monnaies, elles s'établiront d'une façon assez proches de celles existant actuellement entre celles-ci et le renminbi chinois.
Par ailleurs,le CNRF rejettera soit de façon unilatérale non négociée, soit de façon négociée, les diverses obligations imposées actuellement aux Etats-membres de l'Union par les divers traités définissant celle-ci. La négociation de nouvelles relations, sur ces sujets et sur d'autres actuellement non abordées par les traités, mais pouvant être considérées comme prioritaire, sera évidemment recherchée. Seront concernés les Etats restés au sein de l'Union européenne comme tous les autres membres de l'Organisation des Nations Unies en général.
Il en sera de même des obligations imposées aujourd'hui à la France par sa participation à l'Otan (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord). Celles-ci interdisent pratiquement tout rapprochement avec les Brics et l'Organisation de Sécurité de Shanghai. Pourtant les orientations stratégiques adopées par cette vaste partie du monde intéresseront nécessairement sur de nombreux points les relations internationales du CNRF. Il va sans dire à l'inverse que la mise en tutelle des Etats européens résultant de la signature d'un Traité de libre échange transatlantique (TTIP) sera immédiatement dénoncée unilatéralement par le CNRF, quelles que puissent être les mesures de rétorsion imposée par les Etats-Unis, principaux initiateurs de ce traité lui-même « unilatéral ».
Quatrième partie. La question des migrations.
Le thème est de très grande actualité aujourd'hui. Il le sera probablement indéfiniment et en s'amplifiant. Ceci non seulement du fait des guerres, mais des déréglements climatiques s'imposant à des populations incapables encore de contrôler leur démographie. Il n'est pas possible à ce jour ici d'en discuter sérieusement, compte tenu de l'évolutivité du sujet.
On se bornera ici pour fixer les idées à présenter un document que les auteurs de ces éléments de programme viennent de rédiger et mis en ligne par ailleurs:
La France doit investir pour organiser l'accueil aux réfugiés qu'elle recevra
Dans un article qui est en discussion sur le site Admiroutes-Automates intelligents, auquel le lecteur pourra se reporter, nous avons proposé quelques idées qui pourraient permettre à la France d'échapper à la spirale de désinvestissement et de découragement où elle s'enferme aujourd'hui. http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2015/161/CNR.htm
Concernant les migrations, quelques points complémentaires mériteraient d'être évoqués ici, à la lumière des besoins d'accueil qui s'imposent dorénavant du fait des engagements pris par la France en la matière. Il est évident qu'il ne suffira pas à terme d'ouvrir des centres d'hébergement dans lesquels seraient dans un premier temps dirigés les premiers arrivants, ni même de compter sur la bonne volonté des familles acceptant d'en héberger quelques uns (unes) à domicile. Il faudra faire beaucoup plus. Il semble que l'Allemagne ait déjà prévu des mesures à grande échelle permettant d'intégrer au mieux les 500.000 réfugiés par an qu'Angela Merkel invite à venir dans le pays. Certes, comme nous l'avons indiqué dans un précédent article, ceci lui sera relativement facile car les employeurs, en manque de main-d'oeuvre, s'efforceront de recruter et de former ces effectifs, en complément des efforts que fera l'Etat fédéral. Mais des mesures spécifiques de grande ampleur s'imposeront outre-Rhin .
En France, la situation sera moins favorable. Du fait d'une politique malthusienne imposée depuis longtemps par les intérêts néo-libéraux faisant la loi à Bruxelles, la France n'a fait jusqu'ici aucun effort sérieux pour relancer la recherche, l'industrialisation, les services publics et hospitaliers dont elle aurait depuis longtemps besoin pour assurer des emplois convenables à ses propres ressortissants. Or face à l'arrivée de réfugiés, la société dans son entier devra, non se fermer encore davantage au prétexte du sous-emploi dont elle souffre, mais en profiter pour réclamer des pouvoirs publics et des grandes entreprises la mise en place immédiate de programmes de développement ouverts non seulement à ses propres citoyens mais à ces réfugiés, sans distinction d'origine ou de religion.
Ceci représentera un coût certain. Il sera refusé si persiste une politique anti-croissance consistant à réduire les déficits publics jusqu'à la barre fatidique des 3%. Mais des politiques audacieuses d'investissements, fussent-elles financées par des déficits supplémentaires, rapporteraient très vite des bénéfices susceptibles de compenser à terme, et au delà, les efforts budgétaires ainsi consentis. Ce raisonnement d'une simplicité élémentaire, jusqu'ici peu entendu, devrait pouvoir être repris en force par les pouvoirs publics, les partis politique et l'opinion, à l'occasion de l'arrivée des réfugiés.
Aussi bien ne faut-il pas prévoir des mesures spécifiques ne s'appliquant qu'à eux. Il faut relancer la croissance dans tous les secteurs, au bénéfice de tous les français et résidents en France, sans exclusive. Chacun en tirera profit. Il semble que ce soit la politique actuellement décidée par la chancelière Merkel 1) La France accroitrait son retard sur l'Allemagne si elle ne faisait pas de même, sous-emploi ou non.
Évidemment, des mesures différenciées s'imposeront, selon la nature des besoins. Des formations au français ou sur un plan professionnel basique, destinées à rattraper les retards des réfugiés, ne seront évidemment pas inutiles. Mais, dans la plupart des autres domaines, des politiques indifférenciées devraient s'imposer, sous réserve de régler des problèmes d'ajustement temporaires. Cet article n'est pas le lieu pour en traiter en détail. Rappelons seulement les besoins qu'il faudra satisfaire, au bénéfice de tous. Ce rappel ne demande aucun effort d'imagination, car les besoins sont depuis longtemps bien connus en France. Le seul point à signaler concerne le fait qu'aujourd'hui ces besoins non pourvus ne dérangent aucun des « grands décideurs », qu'ils fussent publics ou relevant des entreprises du CAC 40.
Politiques publiques ou privées à renforcer dans l'esprit de ce qui précède
* Identification fine des compétences actuelles non employées, afin de leur fournir des possibilités de formation et d'embauche.
* Mise en place de centres de formation générale et de formation professionnelle destinés à compléter les compétences ainsi recensées, si celles-ci paraissent insuffisantes. Il semble pour le moment qu'un pourcentage important de réfugiés disposent déjà de bonnes qualifications. Il faudra seulement dans un premier temps les aider à les adapter, y compris dans le cadre de l'utilisation de la langue française.. Ajoutons que beaucoup de réfugiés auront les compétences nécessaires pour devenir formateurs eux-mêmes.
* Amélioration du fonctionnement des services relevant de Pôle Emploi ou du secteur coopératif et privé recensant les besoins et les offres.
* Politique de construction de logements autres que simplement d'urgence, dans les zones où, à la suite des évaluations précédentes, des besoins d'hébergement non satisfaits se feront sentir. En Italie, l'idée de proposer à ces émigrés de repeupler et mettre en valeur des zones rurales désormais délaissées est à l'étude. Elle est à recevoir avec précautions. Elle pourrait entrainer la formation de communautés fermées qui viendraient en conflit avec les villages voisins.
* On ajoutera, mais là une pression politique forte des opinions publiques sera nécessaire, l'engagement de politiques publiques ou privées d'investissement, notamment dans les secteurs de l'énergie renouvelable, du logement zéro-énergie, de la future protection contre les effets destructeurs pour l'environnement du réchauffement climatique... N'allons pas plus loin, la liste serait trop longue.
* Pour tout ceci, le rôle des réseaux numériques et des services en ligne devra être fortement accru. Ils sont seuls à permettre de résoudre les problèmes tenant notamment au langage et au manque de proximité.
* Rappelons enfin qu'une politique globale de cette nature ne pourra pas être décidée ou appliquée par les seules associations de bénévoles ou par les collectivités locales. La mobilisation de tous les services de l'Etat sera indispensable.
Bien évidemment, les normes françaises de droit civil, notamment celles relatives à l'égalité hommes-femmes, devront être respectées.
Note
1) voir l'article de Romaric Godin dans La Tribune http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/allemagne-pourquoi-angela-merkel-est-elle-si-genereuse-envers-les-refugies-503128.html
Annexes (à rédiger ultérieurement) .
1) Atouts et faiblesses de la France actuelle.
2) Objectifs scientifiques et technologiques que le CNRF pourra se fixer, compte tenu non seulement des capacités actuelles de la France, mais de celles que l'action volontariste décrite ci-dessus lui donnera. D'une façon imagée, disons seulement ici que ces objectifs pourront s'apparenter à la construction d'une société de type post-humain, évidemment à préciser, pouvant porter remède aux destructions qu'impose l'humanité sous sa forme actuelle tant à elle-même qu'à la planète et à certaines composantes du système solaire.
Postface
Dans un document plus détaillé, nous discuteront les valeurs philosophiques et morales que pourrait se reconnaître officiellement le CNRF. Elles ne s'imposeront évidemment pas aux membres du CNRFse rattachant à d'autres valeurs, tant que celles-ci ne seront pas en conflit direct avec les premières.
Précisons que le texte ci-dessus n'engage que ses signataires, mais en aucune façon les éditeurs et auteurs participant aux divers sites qui accepteront de le publier
Bibliographie
* A titre de référence concernant certains points, le lecteur pourra se reporter à " Ce monde qui vient. Sciences matérialisme et post humanisme au 21e siècle"
Par Jean-Paul Baquiast. Préface de Paul Baquiast
Edition L'Harmattan décembre 2014
Faire http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2015/153/baqbaq.htm
ainsi qu'aux précédents ouvrages publiés par ces derniers.
* Des articles illustratifs seront également joints à l'étude. Citons par exemple
http://www.lesechos.fr/journal20150908/lec1_france/021309269409-les-universites-de-recherche-generent-7-milliards-deuros-de-retombees-par-an-1153283.php