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Cette note est provisoire. Elle est destinée à être discutée.
Elle résume les différentes visions de l'énergie et de la société sous-jacentes aux grandes technologies actuellement en service. Mais elle se veut plus ambitieuse. Nous concluons sur une
proposition qui est de nature institutionnelle : créer une Communauté européenne de l'Energie susceptible de dégager puis de promouvoir de telles visions. Cette
Communauté devrait s'engager sur des voies jusqu'ici refusées par l’Union sous sa forme actuelle : inciter les citoyens européens à préciser le type de société et de mode de vie qu'ils
désirent. Quel serait le modèle de civilisation qu'ils veulent pour eux et qu'ils proposeraient éventuellement au reste du monde.
Il serait évidemment souhaitable qu'une démarche européenne de cette nature puisse être reliée à ce que ferons
ou ne ferons pas d'autres parties du monde. Les problématiques liées à l'énergie n'ont évidemment pas de frontières.
En tant que défenseurs d'une démarche scientifique privilégiant l'invention collective et le dialogue participatif, ajoutons que les humains pourraient sans doute découvrir des solutions
permettant de produire et d'économiser l'énergie très intelligentes, auxquelles personne n'aurait encore pensé.
Mais pour que puissent s'exprimer sur un plan mondial ces immenses capacités anthropotechniques, encore faudrait-il qu'elles puissent s'insérer dans un réel souci de l'intérêt général,
d'une réelle volonté humaniste de partage. C'est selon nous l'enjeu crucial des années qui viennent.
Jean-Paul Baquiast, Christophe Jacquemin pour
Automates-Intelligents
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L'accident majeur qui vient de se produire à Fukushima Dai-Ichi, dont l'issue semble encore indéterminée, est considéré par nombre d'observateurs [dont nous sommes] comme devant obliger
l'ensemble des pays du monde à s'interroger sur le recours à l'énergie nucléaire.
Mais nous pensons qu'il faut aller au-delà. C'est sur la nature-même de l'évolution des sociétés humaines que cet événement pose des questions, ainsi que sur les directions que paraît prendre
cette évolution.
Les guerres mondiales, ou l'explosion de Tchernobyl avaient pu, malgré leur ampleur, passer pour des événements non symptomatiques. Aujourd'hui, Fukushima s'ajoute à un long enchaînement de
crises qui semblent au contraire systémiques, c'est-à-dire remettant en cause l'avenir du Système global dont nous sommes tous des composants. Les Européens sont tout aussi concernés que les
Japonais. Nous voudrions dans cette première note commencer à aborder ces perspectives. Les sciences, les technologies, mais tout autant les systèmes politiques et économiques, sont mis en cause.
Il faut en discuter, tout en évitant les jugements précipités ou dogmatiques.
Dans la terminologie pratiquée sur ce site, nous dirons que Fukushima pose la question de l'avenir des sociétés
anthropotechniques. On peut évidemment traiter de l'avenir des sociétés humaines modernes sans faire appel à cette dernière terminologie ni aux hypothèses méthodologique qu'elle sous-tend. Il
nous paraît cependant intéressant de s'y référer, compte tenu de son caractère selon nous éclairant(1).
Rappelons que nous appelons anthropotechniques les sociétés de primates apparues il y a quelques millions d'années et ayant appris à utiliser en symbiose avec leurs composants biologiques des
outils technologiques ayant leurs logiques évolutives propres. Ceux-ci sont susceptibles de modifier les processus évolutifs naturels de façon plus ou moins brutale et rapide. Ce fut le cas des
outils de pierre, puis du feu. C'est aujourd'hui celui des technologies industrielles, biologiques, informationnelles, observationnelles (utilisées par les sciences). Parmi elles se trouvent les
technologies nucléaires.
Celles-ci permettent aux anthropos d'intervenir aux franges, sinon au coeur du processus mis en oeuvre dans la formation et
l'évolution des étoiles : production d'atomes lourds par fusion d'éléments légers (hydrogène, hélium) et dans certaines conditions restitution d'énergie par fission de ces mêmes atomes
lourds(2). Dans notre approche, les systèmes ou sociétés anthropotechniques sont des superorganismes en
compétition darwinienne pour l'accès aux ressources. Elles ne sont que marginalement capables de se représenter l'avenir du monde et d'enclencher des comportements moteurs susceptibles de
préserver les équilibres collectifs de la planète.
On peut admirer que des primates hominidés - qui ne sont pas agencés différemment au plan biologique de tous les autres organismes un peu complexes - aient réussi à pénétrer certaines des lois
semblant régir l'évolution du cosmos. Les biologistes et anthropologues discutent des facteurs évolutifs qui leur ont permis de le faire, acquisition d'un cerveau surdimensionné, construction de
vastes sociétés communicantes, mémorisation et mutualisation des acquis de connaissances et des résultats d'expérience. Mais on ne doit pas oublier que la physique atomique ne constitue que l'une
des nombreuses autres interventions dans les processus naturels auxquelles procèdent les systèmes anthropotechniques : processus biologiques, reproductifs, cognitifs... Les sciences et techniques
en résultant sont utilisées aussi bien pour l'amélioration des conditions de vie des sociétés s'efforçant de les maîtriser que pour la destruction des sociétés rivales. Il ne servirait donc pas à
grand chose de discuter de l'avenir du nucléaire sans replacer celui-ci dans l'évolution des sociétés anthropotechniques que nous venons de résumer.
Pour la clarté de l'exposé, nous le présenterons en trois parties, qui seront elles-mêmes des résumés trop sommaires de la
richesse des questions sous-jacentes.
1. Les contraintes majeures auxquelles l'humanité sera confrontée dans le présent siècle
2. Privilégier une vision pessimiste-réaliste de l'avenir
3. Regard sur les différentes formes d'énergie
Conclusions concernant la France et l'Europe
1. Les contraintes majeures auxquelles l'humanité sera confrontée
dans le présent siècle
Il faut examiner l'avenir du nucléaire et plus généralement de toutes les technologies aujourd'hui émergentes en tenant
compte des contraintes majeures auxquelles, du fait de leur propre évolution, les sociétés anthropotechniques (ou si l'on préfère parler plus simplement, l'humanité mondiale) seront confrontées
dans les 50 à 100 prochaines années.
Il s'agit là de thèmes de prospective et de débats qui font par ailleurs l'objet de nombreuses discussions entre experts et scientifiques. Malgré de fréquentes divergences d'approches, de grandes
lignes paraissent pouvoir en être dégagées. On doit impérativement en tenir compte dans la réflexion engagée ici. Peut-on les résumer en quelques mots ?
Le pronostic que vient de
proposer le géographe et spécialiste en sciences de la Terre Laurence Smith dans un livre récent «The World in 2050»(3), nous paraît recevable. Certains diront même qu'il est banal, le constat ayant déjà été fait par de nombreux
prospectivistes(4). Encore faut-il méditer ce qu'il implique.
Selon cet auteur, d'ici 2050, horizon auquel il limite sa prospection, l'humanité comme avec elle le monde biologique
terrestre et maritime affronteront quatre grands phénomènes irrévocables dont chacun mériterait à lui seul de longs développements :
La croissance démographique
Contrairement à ce qu'en disent les théoriciens de la «transition démographique» le développement démographique humain paraît loin d'être maîtrisé sur la période. Selon les pays, il se traduira
par des natalités excessives mais aussi par des vieillissements inquiétants. L'augmentation de la population contribue en premier lieu à la raréfaction des ressources naturelles (voir
ci-dessous). On explique qu'en mutualisant les ressources, notamment alimentaires, l'humanité pourrait faire face à cet accroissement. Mais cette mutualisation ne sera pas facilement acceptée par
les bénéficiaires actuels des surplus.
Une raréfaction croissante des ressources naturelles
Cette raréfaction ira jusqu'à la disparition de nombre de ressources naturelles, notamment dans le domaine biologique. La mise au point de nouveaux procédés (y compris la récupération) et de
nouveaux produits ne pourra pas pallier les manques, du fait des coûts et délais impliqués, mais aussi parce que les nouveaux produits sont eux-mêmes consommateurs de ressources en voie de
raréfaction.
Les conséquences généralement perturbatrices du réchauffement climatique,
quelles qu'en soient les causes
Ce point n'est plus discuté par les scientifiques sérieux. Il entraînera une remontée vers les pôles des températures moyennes et de nombreux phénomènes catastrophiques météorologiques et
climatologiques. Plus vite peut-être qu'actuellement envisagée se manifestera aussi la montée du niveau des eaux maritimes imposant l'exode d'activités urbaines et industrielles parmi les plus
productives du monde.
Le phénomène général de la mondialisation
Ce terme recouvre quantités de phénomènes dont certains peuvent être considérés comme positifs mais d'autres dangereux. On met à l'actif de la mondialisation la diminution du coût de certains
biens de consommation due à la concurrence entre producteurs. Les niveaux de vie de nombreuses populations pauvres en ont bénéficié. Mais le processus a son aspect négatif. La diffusion des
modèles de consommation propres aux classes riches des pays riches à travers la publicité commerciale sur les réseaux numériques conduit à une explosion globale des besoins exprimés, que les
ressources mondiales actuellement disponibles ne permettront pas de satisfaire. Nul ne peut envisager sérieusement que chaque habitant de l'Asie ou de l'Afrique puisse disposer par exemple d'une
automobile, c
omme la majorité en Europe ou en Amérique. La mondialisation
telle qu'elle s'organise dans le cadre du capitalisme et du libéralisme économique conduit plus généralement à la domination de modèles de consommation et de modèles de société qui sont à
l'opposé des modes de vie plus associatifs, plus mutualistes et orientés vers de nouvelles valeurs encore à inventer.
Sous la pression des producteurs et des distributeurs dominants, la diffusion de ces modèles de consommation conduit par
ailleurs à la destruction des sociétés traditionnelles, sans leur proposer de modèles de remplacement. Ces sociétés traditionnelles étaient essentiellement rurales. Au lieu de chercher à les
faire évoluer et se moderniser sur place, les gouvernements encouragent ou tolèrent les migrations des populations rurales vers des mégalopoles urbaines dont certaines seront relativement riches
mais d'autres misérables et instables. Il faut insister sur ce phénomène
spectaculaire de l'urbanisation, se traduisant par le fait que la plus grande partie de l'humanité vivra prochainement dans des villes incapables de subsister seules. Du fait de l'appel
généralisé à différentes technologies relevant de l'artificiel, il en résulte déjà une fragilité extrême. Le fait que ces villes pourraient par ailleurs s'effondrer très rapidement si elles
étaient privées d'énergie, sous sa forme la plus souple qu'est l'électricité, constitue un des aspects des questions posées par l'augmentation généralisée de la demande en énergie.
A cette prévision, nous pourrions pour notre part apporter un complément de type politique. Les anthropos ou humains,
associés aux techniques, n'acquièrent pas nécessairement les propriétés mentales leur permettant de se représenter au-delà de leurs intérêts propres ceux de l'humanité et de la planète au sens
large. Si certains le font, les prévisions et recommandations qu'ils émettent demeurent impuissantes à modifier les comportements collectifs de façon telle qu'elles puissent inverser le cours de
l'évolution. Malgré la puissance de nos cerveaux, nous ne sommes pas en effet capables d'influencer ce que l'on pourrait pour simplifier définir comme les gènes guidant nos grands comportements
collectifs, gènes hérités d'un passé biologique lointain et toujours actifs. Le généticien (chrétien) Christian De Duve remarquait récemment(5) que les humains ne sont pas génétiquement programmés pour prévoir l'avenir au-delà de quelques jours et surtout
pour adopter concrètement des mesures de précautions découlant de ces prévisions. Les discours les plus moralisateurs et les mieux intentionnés n'en changeront rien.
Ajoutons par ailleurs que les compétitions entre humains, moins que jamais en voie de s'apaiser, conduisent à l'émergence
de minorités oligarchiques associant pouvoirs économico-financiers, pouvoirs politiques et pouvoirs médiatiques. Les uns et les autres font tout pour que les autres citoyens soient exclus de la
décision. La démocratie participative reste partout un voeu pieux(6). Ces pouvoirs oligarchiques, dans leurs
compétitions internes, comme l'a bien souligné De Duve, sont incapables de prendre en compte un intérêt général plus global autrement que dans des discours démagogiques. A par quelques cas
marginaux, l'expérience montre que les foules dominées ne peuvent espérer utiliser les procédures dites démocratiques (là où elles existent, ce qui n'est pas le cas partout) pour remettre en
cau
se les pouvoirs des oligarchies. Les autoritarismes
ne reculent que là où, poussées à bout par les excès de pouvoir dont elles souffrent, certaines populations génèrent spontanément en leur sein des révoltes plus ou moins sauvages, dont il est
impossible de prédire les conséquences, qu'elles soient heureuses ou qu'elles aboutissent à de nouvelles tyrannies. Nous avons évoqué ce phénomène sur notre site, à propos des révoltes dites du
nouveau monde arabe, ou de celles survenues au coeur du système capitaliste, à Madison (USA).
2. Privilégier une vision pessimiste-réaliste de l'avenir du monde
Si nous considérons comme globalement fiable l'évaluation rappelée ci-dessus, nous ne pouvons qu'en retenir une vision
pessimiste de l'avenir probable. Nul ne sait évidemment de quoi cet avenir sera fait. Mais la pire des erreurs de prévision consisterait à s'imaginer que «tout s'arrangera», pour des
raisons tenant plus d'une croyance quasi mystique au progrès que d'un réalisme froid. Certes, le pessimisme ne doit pas être utilisé comme argument pour expliquer aux victimes des oligarchies
qu'elles ne pourraient rien faire pour améliorer leur sort, notamment par la lutte sociale. Le pessimisme doit servir en priorité à mesurer les obstacles et les risques pour se préparer, au moins
mentalement, à les affronter. Dans cette optique, plusieurs tendances lourdes pourraient marquer les prochaines décennies.
Une croissance accélérée de la consommation et donc
de la production des biens et services en général
Pour les raisons indiquées ci-dessus, croissance démographique, mondialisation poussant à l'adoption de niveaux de vie inspirés de ceux des pays développés, urbanisation rapide, volonté de profit
à court terme animant les principaux acteurs économiques, il serait illusoire d'espérer une stabilisation des consommations-productions globales. Tout au plus pourrait-on espérer dans les pays
riches une stabilisation, voire une «décroissance», des formes de productions-consommation les plus gourmandes en ressources primaires. Mais, comme nous le verrons plus loin, une telle
stabilisation ou décroissance ne se produira d'après nous que dans certains milieux «activistes», inspirés par une morale de la sobriété et du partage proche d'une véritable religion. Les signes,
symboles ou «mèmes» de cette nouvelle religion décroissantiste, il est vrai, pourront profiter pour
leur «contamination virale» des supports offerts par les réseaux numériques.
Evidemment, on pourrait envisager une diminution globale massive des consommations et des investissements correspondants. Mais ceci ne se produirait qu'en cas de catastrophes mondiales dont
personne ne peut raisonnablement espérer la survenue. Ces catastrophes pourraient provenir soit d'événements de grande ampleur liés au réchauffement climatique, soit d'un accident technologique
majeur, notamment nucléaire, empoisonnant une grande partie de la Terre (nous y reviendrons), soit de conflits généralisés.
Une croissance corrélative des besoins et donc de la consommation-production d'énergie
Si la croissance des consommations se poursuivait, il
serait illusoire d'espérer une stabilisation, ni même une limitation de la croissance du recours à l'énergie, quelles qu'en soient les formes, sauf, à nouveau, la survenue de catastrophes de
grande ampleur affectant l'une ou l'autre de ces énergies et rendant son utilisation radicalement impossible. Rappelons que les économies d'énergie, qui seront plus que jamais indispensables dans
cette perspective, supposent un haut niveau technologique général qui ne les rend pas toujours accessibles aux pays pauvres. Ceci veut dire que, dans le demi-siècle, aucune force au monde ne
semble pouvoir empêcher les pays en développement le plus rapide (Chine, Inde, Indonésie) de faire appel au charbon, au pétrole, au gaz mais aussi au nucléaire, comme sources primaires. Les
énergies renouvelables se développeront aussi. Mais leurs contreparties, en termes de coût, stockage, transport, empêcheront qu'elles ne deviennent les seules sources utilisées. Par ailleurs,
l'électricité, malgré ses inconvénients (coût des réseaux de transport et de distribution, difficulté de stockage) sera de plus en plus employée, sinon dans les transports automobiles, du moins
dans l'industrie/services et dans la vie domestique
La fragilisation accrue des systèmes économiques et sociaux
Plusieurs facteurs expliquent cette fragilisation : l'accroissement de la population et de la demande globale au regard des ressources disponibles et des possibilités de réponse des écosystèmes,
l'artificialisation accrue des modes de vie y compris dans les mégalopoles les plus pauvres, faisant dépendre la survie de facteurs de moins en moins susceptibles de solutions de secours en cas
de crise (par exemple le recours généralisé à l'électricité pour assurer l'ensemble des activités sociétales), la course au profit immédiat et à la dérégulation qui dépossèdent [avec leur
bénédiction ?] les autorités étatiques de leur rôle traditionnellement protecteur et normatif, l'illusion que les progrès technologiques futurs pourront pallier tous les risques. Il faut
envisager aussi les risques tenant à des attentats soit d'origine politique, soit liés à des pathologies mentales.
Même dans les pays développés, par volonté d'économie et de profit, les sociétés urbaines ont sacrifié la diversité et la dispersion des sources et des réseaux. Une grève dans le secteur
pétrolier, des pannes ou attentats dans certains noeuds de distribution ou de transports, une pandémie infectieuse meurtrière et tout s'arrête, y compris les services d'urgence et de police. Les
régions soumises aux risques naturels sont encore plus fragiles car elles ne sont pas encore préventivement protégées.
La bunkerisation sinon la militarisation de plus en plus systématique
des riches et des puissants
Qu'il
s'agisse des matières premières ou des territoires, plus les difficultés d'accès aux ressources s'aggraveront, plus les moins favorisées des détenteurs de ces ressources feront pression pour y
accéder. Les minorités favorisées se surprotégeront en conséquence. Cela se constate déjà au niveau des frontières terrestres ou maritimes, mais aussi au sein des quartiers et zones
résidentielles dans les villes. Les protections feront de plus en plus appel à des moyens de type militaire, confiées soit à l'armée ou la police régulières, soit à des compagnies privées. Le
respect de la vie humaine ne comptera plus guère au regard de la volonté de rendre les frontières étanches. On le constate déjà en Europe, à toute petite échelle, devant l'indifférence sinon la
satisfaction avec lesquelles certains accueillent la nouvelle de naufrages affectant les immigrants venus du Sud. La militarisation fera un appel croissant aux systèmes robotisés de surveillance
et de contrôle qui n'ont pas d'états d'âme.
Le recul, partout dans le monde, des anciennes traditions de service public
et de régulation par des Etats protecteurs
Ce phénomène, que l'on pourrait qualifier de dramatique au regard de la protection des populations contre les abus de pouvoir des oligarchies, a commencé dès la fin de la seconde guerre mondiale,
sous la pression du capitalisme américain et de l'idéologie libérale derrière laquelle il s'abritait. Il a tiré parti, il est vrai, des abus de pouvoirs perpétrés au nom du peuple par les
dictatures se réclama
nt du marxisme. Mais dans la débâcle des Etats et des administrations publiques qui en a résulté, les idéaux un moment illustrés avec succès en France au nom du programme du Conseil national
de la résistance (Etat providence, administrations intègres, nationalisations des secteurs stratégiques y compris dans la banque et l'assurance) ont été balayés. Aujourd'hui, les fonctions
publiques qui s'en inspiraient ne survivent plus que dans le souvenir de leurs membres retraités. Les actionnaires privés qui gouvernent maintenant les grands services publics n'hésitent plus,
pour raisons de rentabilité, à confier les secteurs les plus sensibles, y compris le nucléaire, à des sociétés d'intérim elles-mêmes privées des moyens essentiels de fonctionnement.
3. Les différentes formes d'énergie composant le mix
énergétique
On appelle mix énergétique la façon dont se répartissent, soit au niveau mondial, soit pays par pays, l'appel aux
différentes sources d'énergie. Le mix peut être calculé avec une relative précision quand il s'agit des productions/consommations actuelles. Il faut aussi l'évaluer pour les années et décennies à
venir. La précision, dans ce cas, diminue avec le délai et la nature des sources prises en compte. Elle dépend des technologies d'extraction et de production, des réserves prouvées ou estimées,
des capacités de transport et de stockage, mais aussi, concernant les énergies renouvelables et les économies d'énergies, de nombreuses variables industrielles et commerciales qu'il n'est pas
encore possible de déterminer. Les estimations des productions et ressources mondiales d'énergie sont difficiles à réaliser avec précision. Néanmoins, dans le cadre de cet article, elles nous
semblent suffisantes. On pourra se référer à Wikipédia, qui indique aussi les unités de mesures utilisées(7).
Le mix énergétique fait aujourd'hui l'objet de nombreuses estimations destinées à évaluer le rôle du nucléaire, devenu sensible à la suite de l'accident de Fukushima. Globalement, la part du
nucléaire dans le mix énergétique mondial paraît très faible. Selon les chiffres que vient de publier l'Agence internationale des énergies renouvelables(8), elle est de 6%, contre 87% pour le trio charbon, pétrole, gaz, et 7% pour les renouvelables. Ces chiffres
devraient, sauf accident, passer respectivement en 2035 à 8%, 78% et 14%. Il est difficile de prévoir comment il évoluera au-delà. Les combustibles fossiles auront peut-être atteint un pic
d'extraction vers 2050, mais le nucléaire, faute de matière première et en attente problématique de la fusion, plafonnera également. L'importance des renouvelables dépendra beaucoup des
financements et de la recherche qui leur seront consacrés. Voyons cela par grands domaines.
Les énergies fossiles
Tout à déjà été dit concernant ces énergies : charbon, pétrole, gaz. Rappelons seulement ici quelques points concernant le propos de cet article. Concernant les atouts dont ils bénéficient, aux
yeux des dirigeants mais aussi du public, disons que les réserves prouvées restent importantes, notamment à l'échéance du demi-siècle. Concernant les réserves probables, il existe des
perspectives d'extraction coûteuses et dangereuse pour l'environnement mais que ne manqueront pas de recommander les industriels (schistes bitumineux, forages profonds, appel aux méthanes, etc.).
Les réserves actuelles sont inégalement réparties, mais dans l'ensemble ce sont les pays "pauvres" ou émergents qui détiennent les plus importantes d'entre elles. L'extraction des combustibles
fossiles est par ailleurs relativement facile et à la portée des pays ne disposant pas de technologies très avancées. Elle est dangereuse, notamment en ce qui concerne le charbon. Mais la mort
des mineurs n'émeut manifestement personne. Un autre atout important est que l'utilisation des combustibles fossiles n'exige pas de transformation des parcs industriels ou, en ce qui concerne les
transports, des moteurs.
Concernant le gaz, jugé globalement moins polluant et moins producteur de CO2 que le pétrole, la découverte récente de «gaz de schistes» ou «shale gaz» très présent dans de nombreux
pays consommateurs est considérée par les intérêts gaziers comme une aubaine inespérée. Mais les méthodes de recherche et d'extraction, par hydro-fracturation, soulèvent à juste titre de fortes
oppositions des personnes résidant près des puits(9). Comme ceux-ci sont très dispersés, la résistance
s'étendra prochainement à de nombreux territoires. Elle risque de devenir aussi forte que celle s'opposant au nucléaire.
Au passif, les combustibles fossiles contribuent lourdement à la
production de gaz à effet de serre et de diverses pollutions qui ont un effet sanitaire néfaste incontestable. Ils sont donc vivement combattus par les scientifiques du climat et les minorités
politiques qui soutiennent leur combat. Nous sommes de ceux-ci. Il nous paraît incontestable que le réchauffement climatique entraînera de graves conséquences sur les équilibres économiques et
sociétaux actuels. Les activités humaines n'en sont sans doute pas les seules causes, mais tout ce qui contribuera à en accentuer les effets serait à proscrire au plus vite. Les solutions
proposées par divers lobbies industriels et scientifiques visant à séquestrer le carbone ou protéger la Terre des rayons solaires risquent d'être encore longtemps des utopies. Il faudrait donc
sortir rapidement, comme on le dit à propos du nucléaire, de l'addiction au charbon et au pétrole.
Mais ceci ne se fera pas, notamment sous la pression des pays émergents qui ont besoin de ces ressources pour atteindre leur objectif actuel, approcher le niveau de vie des pays riches. Il serait
donc illusoire de penser que la part des combustibles fossiles dans le mix énergétique mondiale diminuera sensiblement dans les cinquante prochaines années. Comme nous l'avons indiqué, elle
restera aux alentours de 70%. Ce sera indiscutablement très dangereux pour l'environnement. Il sera trop tard pour s'en soucier lorsque sera atteint ce que les climatologues nomment le
«tipping point», avec emballement en chaîne des effets destructeurs. Mais les risques n'étant pas immédiats, nul ne semble se préoccuper et se préoccupera vraiment de ces échéances dans
les prochaines années.
Les énergies renouvelables et les économies d'énergie
On peut examiner dans la même
rubrique ces deux formes d'action, visant à diminuer l'appel tant aux combustibles fossiles qu'au nucléaire. Elles présentent de nombreux aspects positifs. C'est moins dans l'immédiat au regard
de leur effet en tant que producteurs primaires d'énergie que sur la forme de société permettant d'y faire appel que les énergies renouvelables paraissent intéressantes. Disons pour résumer
qu'elles conviennent particulièrement à l'idéal d'une société où se démocratiserait l'accès aux technologies et aux sciences fondamentales. Dans le cadre de notre revue, nous ne pouvons pour
notre part que militer pour leur développement. En principe, avec du temps, des moyens budgétaires importants, beaucoup de ressources en matières premières dont certaines rares, beaucoup
d'énergie classique aussi aux débuts, une volonté politique sans faille enfin, la plupart des usages actuels de l'énergie traditionnelle, y compris ceux intéressant les carburants liquides,
pourraient être satisfaits à partir du soleil, du vent, de la géothermie, de la houle, de la transformation des déchets, de la photosynthèse. Par ailleurs, à l'échelle du siècle, différents
projets encore futuristes permettraient, par exemple avec des centrales solaires orbitales, de s'affranchir des contraintes locales.
Parallèlement, avec là aussi les mêmes moyens globalement importants, les économies d'énergie pourront contribuer sensiblement à la diminution de la facture énergétique globale. Il pourra d'abord
s'agir de modes de vie moins dispendieux, plus ascétiques, (pouvant parfois il est vrai prendre la forme d'un certain «terrorisme intellectuel»). Il pourra aussi s'agir de nouvelles solutions
industrielles visant à ce que l'on nomme l'efficacité énergétique: remplacer les techniques et matériels gros consommateurs, y compris en électricité, par des solutions plus économes. Mais il
pourra aussi s'agir là, sous l'influence des lobbies industriels pratiquant le "green-washing", d'une façon de relancer de nouvelles formes de consommations non véritablement nécessaires.
L'intérêt des énergies renouvelables, comme des économies d'énergies, est tout autant politique que strictement économique. Les recherches/développements comme les investissements à y consacrer,
bien qu'importants, pourraient être distribués géographiquement et socialement. Ils ne seraient donc pas exclusivement le monopole des géants des secteurs énergétiques ou des industries
manufacturières. Les collectivités locales, les «citoyens» pourraient s'impliquer directement, soit dans la mise en oeuvre des nouvelles sources d'énergie, soit tout autant et plus dans le
domaine essentiel des économies d'énergie. Des modes de vie qui paraissent essentiels pour faire face aux crises futures pourraient en résulter: inventivité permanente, refus des modèles de
consommation-gaspillage, volonté de partage social y compris au bénéfice des pays pauvres. L'avenir enfin pourra faire apparaître, car il s'agira de secteurs en inventivité permanente, des
solutions technologiques ou sociétales tout à fait inattendues.
Tous ces avantages expliquent le fait que l'ensemble des Etats, des plus développés aux plus pauvres, mettent aujourd'hui les secteurs correspondants au premier plan de leurs programmes
économiques et politiques. Mais il ne faut pas se faire d'illusions. Nous l'avons vu à propos des combustibles fossiles, ces mêmes Etats continueront pour l'essentiel à y faire appel. Nous allons
voir ci-dessous ce qu'il en est de l'énergie nucléaire. Si l'on tient compte de différents facteurs de blocage que les défenseurs des énergies renouvelables n'envisagent pas volontiers, il paraît
raisonnable de penser que dans les trente prochaines années la part des renouvelables ne dépassera pas 30% des besoins, estimation d'ailleurs supérieure aux prévisions de l'Agence internationale
précitée en charge du secteur(10).
Le nucléaire
Celui-ci pose des problèmes particuliers. A la suite de l'accident de Fukushima, ils génèrent actuellement de nombreuses discussions. Nous devons y consacrer ici quelques développements
spécifiques.
Pourquoi, dira-t-on, courir tous les risques sous-jacents au nucléaire, et faire courir ces risques au monde dans son ensemble pour un si faible résultat global, soit quelques % du panier
énergétique global. Les réponses sont complexes car la maîtrise de l'énergie nucléaire peut dans une certaine mesure résumer toutes les ambitions et les contradictions de l'aventure humaine,
autrement dit les ambitions des sociétés anthropotechniques qui se sont investies dans les filières à très haute technicité. Bien que moins risquée au plan global, l'exploration des planètes
proches par certaines nations relève dans une certain mesure aussi de ce que certains qualifient d'aventure inutilement coûteuse.
Le nucléaire n'est pas une énergie comme les autres
Nous avons vu que la compétition pouvant prendre la forme de
guerres ouvertes a toujours été et demeurera sans doute longtemps un des moteurs de l'évolution des sociétés anthropotechniques. Les protestations pacifistes n'y changeront pas grand chose avant
longtemps, à moins de catastrophe globale qui modifierait en profondeur les états d'esprits. Il ne faut pas oublier que ce fut la réalisation d'armes atomiques qui a poussé chacun à son tour les
cinq grands du club nucléaire mondial initial (USA, Russie, Grande Bretagne, France, Chine) à se doter des moyens d'extraire de l'énergie à partir de la fission de l'uranium puis de la fusion de
l'hydrogène. Les armées de ces pays considèrent encore par ailleurs que la propulsion atomique appliquée à certains de leurs navires demeure la seule solution permettant d'assurer autonomie à
long terme et discrétion. Y compris dans les pays qui n'en sont pas dotés, l'arme nucléaire enfin reste partout considérée comme un moyen ultime mais incontournable de dissuasion. Le nombre des
Etats qui ont suivi ou veulent suivre cette voie ne cesse de grandir, malgré les efforts des Cinq pour empêcher la prolifération dans le cadre du Traité du même nom. Israël, l'Inde, le Pakistan,
sans doute la Corée du Nord, sont dorénavant dotés de la bombe. D'autres comme l'Iran, le Brésil, l'Afrique du Sud s'y s'efforcent plus ou moins discrètement.
Tous les programmes politiques affichant l'objectif de sortir du nucléaire se heurteront longtemps à cette réalité. Les
industries et les laboratoires nucléaires travaillant pour la défense ne seront jamais fermés, quels que soient les risques pouvant en résulter. Les militaires et les diplomates feront valoir,
sans doute à juste titre, qu'un pays comme la France renonçant à sa force nucléaire stratégique pour faire preuve de bonne volonté dans la compétition entre les nations se mettrait ipso facto
sous la dépendance de pays n'hésitant pas à utiliser des armes dites conventionnelles tout aussi destructrices. Ce point est régulièrement discuté dans les cercles stratégiques européens. On peut
penser que des Etats comme l'Allemagne ou l'Italie qui pour diverses raisons n'ont pas développé de «parapluie nucléaire» seraient heureux de profiter, en cas de menaces majeures, de la
dissuasion offerte par la France et la Grande Bretagne, à défaut de l'appui des celle des Etats-Unis, sur lequel les Européens ne peuvent désormais plus compter(11).
Un autre atout considéré de l'énergie nucléaire, qu'elle soit appliquée au militaire ou au civil, est qu'il s'agit d'un
«vecteur de puissance». Ce point est généralement peu mis en évidence par les Etats qui souhaitent y faire appel. On désigne par ce terme les technologies dont le développement ou l'utilisation
obligent à recruter et former des équipes de haute compétence, sous la responsabilité d'administrations centralisées très proches des gouvernements. Elles nécessitent aussi une forte protection
poussant à la mise en place de mesures policières de contrôle inhérentes à une vision régalienne exacerbée de la gestion publique. On peut dire la même chose des technologies ou équipements
militaires ou spatiaux, comme de tous les grands réseaux centralisés et fragiles sur lesquels reposent dorénavant les sociétés civiles. Les défenseurs des autres formes d'énergie vantent au
contraire leur caractère modulable et décentralisable, présenté comme plus démocratique.
Il est facile de critiquer les technologies de puissance et les administrations fortement organisées et sécurisées qui
devraient en principe être chargées de les mettre en oeuvre. Mais le faire serait oublier que le siècle actuel ne sera pas celui de la facilité et de l'improvisation. Ce sera celui des crises. Ne
survivront que les organisations ayant un minimum de contrôle et de cohérence dans leurs actions. L'expérience acquise dans la prévention, voire dans la "réparation" des grandes crises
naturelles, technologiques, humaines, sera une des conditions de la survie.
Il est donc particulièrement paradoxal que sous l'influence du néolibéralisme développé en Occident, voire dans des pays
plus autoritaires comme la Russie et la Chine, les oligarchies au pouvoir veuillent sous-traiter les tâches nécessairement régaliennes de conception et de contrôle des industries et des activités
nucléaires à des entreprises privées ne visant que le profit à court terme de leurs actionnaires. Cette même volonté de privatisation est en train de détruire les traditions militaires et
aujourd'hui spatiales de pays comme les Etats-Unis ou la Russie. Au mépris de l'intérêt général, les compagnies privées y assurent dorénavant des objectifs stratégiques de court terme. Avec la
sécurité des biens et des personnes, elles accaparent des responsabilités jusqu'ici confiées à des administrations militaires et civiles disposant de décennies de tradition du service
public.
Il est évident que dans ces conditions, comme le montre l'exemple déplorable du Japon, la gestion «privée» de l'énergie
nucléaire ne pouvait que révéler à long terme des failles désastreuses. Certes, répétons-le, le nucléaire est dangereux, mais en confier la responsabilité à des sociétés capitalistes ne peut
qu'augmenter sa dangerosité. Une nationalisation s'imposerait, mais le Japon, sous l'influence du gouvernement américain champion du libéralisme l'ayant mis sous tutelle à la fin de la Seconde
guerre mondiale, a perdu toutes les références en matière de gestion publique dont il disposait sous l'ancien Empire du Soleil Levant – dont les militaires il est vrai firent un usage désastreux
dans les années 1930-1945. En Europe, il y a tout lieu de craindre que la «libéralisation rampante» du gaz, de l'électricité et du nucléaire ne conduise aux mêmes catastrophes.
Avantages et risques spécifiques au nucléaire
Au-delà des considérations de nature stratégiques, qui peuvent pousser à conserver l'industrie nucléaire comme un vecteur de puissance, d'autant plus formateur qu'il est générateur de risques,
que peut-on dire des avantages et risques du nucléaire au regard des autres formes d'énergie ?
Le sujet a été amplement débattu. Inutile de s'y attarder ici. En ce qui concerne les avantages, d'une façon générale, même s'il ne couvre qu'une partie des besoins en énergie (essentiellement en
électricité), le nucléaire permet aux pays utilisateurs de diversifier le panier énergétique, de faire appel à des emplois locaux pour la maintenance et de générer des revenus pouvant bénéficier
aux collectivités locales hébergeant les sites. Pour les pays producteurs de centrales, à ces avantages s'ajoutent les économies sur les redevances versées aux pays pétroliers, l'acquisition
d'une capacité exportatrice et une certaine indépendance politique, même s'ils ne disposent pas directement des gisements d'uranium nécessaires.
Au regard, jusqu'à ces dernières semaines, les risques apparaissaient peu inquiétants pouvant au pire se limiter à des
accidents maîtrisables. Le principal reproche fait au nucléaire était son coût qui, selon les promoteurs des autres formes d'énergies, notamment les renouvelables, empêchait de développer ces
dernières à l'échelle et à la vitesse dorénavant nécessaire. L'argument ne tient pas dans les pays prudents où, comme en Chine, l'appel au nucléaire reste partiel et n'assèche pas les ressources
d'investissement consacrées à l'énergie en général.
Mais l'expérience du Japon conduira sans doute à réévaluer les risques au regard des avantages. La menace d'un accident majeur pouvant rayer des régions
entières de la carte, dans un pays ou pire encore dans un ensemble de pays, ne serait évidemment pas acceptable, ni par un gouvernement, ni par la communauté internationale. Mais un tel accident
pourrait-il se produire, si des précautions et des sécurités particulièrement contraignantes étaient mises en oeuvre?(12) Ce sont à ces questions que devront répondre les pays décidés à fermer leurs centrales ou à ne pas en acquérir,
comme les pays décidés à conserver leurs centrales ou à en construire de nouvelles. Rappelons que la construction de dizaines de nouvelles centrales était jusqu'à présent programmée dans
l'ensemble du monde.
Le choix d'abandonner le nucléaire
Le nucléaire n'est pas une énergie
comme les autres, en ce sens qu'elle touche aux bases mêmes de l'organisation de la matière-énergie. Elle est potentiellement particulièrement dangereuse en terme de production de catastrophes
brutales et visibles, comme en ce qui concerne la gestion du combustible et des déchets. L'utilisation des énergies fossiles présente des risques certains,
notamment celui de contribuer à l'effet de serre et donc aux catastrophes découlant du réchauffement climatique. Mais ces risques sont plus diffus et bien plus lointains. On conçoit donc que de
plus en plus de personnes demandent l'abandon de l'énergie nucléaire. Cela ne posera pas de problèmes particuliers lorsqu'il s'agira, comme ce sera le cas dans la majorité des pays, de renoncer à
construire des centrales. Il faudra seulement trouver des sources d'énergies de substitution, en évitant la facilité consistant à s'en tenir aux combustibles fossiles. Bien plus difficile à faire
sera le choix consistant à fermer des centrales existantes. Celles-ci produisent de l'électricité que l'on ne pourra pas obtenir d'autres sources du jour au lendemain. Chacun convient, même les
anti-nucléaires les plus convaincus, que renoncer aujourd'hui au nucléaire posera de nombreux problèmes qui ne seront pas résolus avant plusieurs décennies.
Il faudra d'abord arrêter et démanteler les centrales les plus dangereuses :
centrales vieillies mais encore en service dans les pays développés et dont on repousse sans arrêt l'arrêt, centrales soit vieillies soit mal entretenues dans
des pays plus pauvres. Les pires de celles-ci sont les réacteurs de type Tchernobyl encore en activités. Il faudra aussi sécuriser les entrepôts de combustibles et les décharges de déchets ou
d'armes nucléaires tels que ceux laissés à l'abandon en Russie. Tout ceci demandera plusieurs années sinon plusieurs décennies, en fonction des moyens affectés. Il faudra par ailleurs que ces
mesures s'appliquent à tous les pays potentiellement menacés, sans exception. A quoi bon arrêter une centrale dans un pays donné si une centrale bien plus dangereuse potentiellement demeure en
activité dans un pays voisin ?
Il faudra ensuite entretenir les centrales dont l'arrêt progressif aura été décidé, avant que cet arrêt puisse effectivement être concrétisé – avant notamment que de nouvelles formes d'énergie
aient pu prendre le relais. Mais comment alors distinguer entre entretenir une centrale en l'état et implémenter progressivement des solutions qui la rendrait plus sûre et donc plus acceptable
?
Dans les deux cas, tous les crédits affectés à ces opérations, dont le chiffrage est très difficile, seront prélevés sur des dépenses que les gouvernements ou les électorats jugeront prioritaires
– y compris d'ailleurs sur les investissements destinés aux énergies renouvelables. Dans ces conditions, on peut craindre que les dépenses de sécurisation soient limitées au maximum, ou étalées
dans le temps, quitte à espérer que les catastrophes possibles ne se produiront pas...
.
Le choix de conserver le nucléaire
Un tel choix est caricaturé par le terme de «tout nucléaire». Le terme n'a pas lieu d'être. Personne ne prétendra après Fukushima, qu'il faudra ne conserver que le nucléaire comme
source d'énergie. Ceci même en France où le nucléaire couvre environ 70% des besoins en électricité. Pour les raisons de sécurité qui viennent d'être évoquées, et quel qu'en soit le coût, il est
donc nécessaire de programmer l'arrêt et le démantèlement des centrales les plus vieillies ou situées sur des sites reconnus comme à risques au regard de normes de sécurité renforcées. Ceci aux
conditions de délais et de sécurisation que nous avons évoquées dans le paragraphe précédent. Faudrait-il renoncer pour autant à construire de nouvelles générations de centrales ? Les défenseurs
de l'énergie nucléaire feront valoir qu'une telle décision représenterait un véritable crime contre la science, privant les générations futures de toutes compétences nucléaires, civiles ou
militaires,
Une solution de compromis pourrait consister, non à remplacer toutes les centrales anciennes par des centrales de nouvelle génération, mais à mettre en place, pays par pays ayant fait le choix de
conserver une compétence nucléaire, une ou deux centrales présentant le maximum de solutions de sécurité. Est-ce le cas de la solution EPR actuellement proposée par Aréva ? Serait-ce le cas des
solutions dites de 4e ou de 5e génération discutées dans les cercles techniques ? Ce n'est pas le lieu d'en traiter ici. Mais il devrait certainement être possible de s'accorder sur des solutions
de ce type, à condition qu'elles soient développées par des opérateurs non-commerciaux (autrement dit des services publics non astreints à rentabilité) et sous un contrôle démocratique permanent.
Ceci veut dire aussi qu'il faudra parallèlement proscrire chez soi comme chez les autres, par un accord international en ce sens, l'appel à des solutions dites low-cost dans lesquelles certains
pays se sont déjà engagés.
Corrélativement, les pays qui conserveront des centrales nucléaires devront accélérer la mise au point des énergies de
fusion considérées aujourd'hui comme ne présentant pas tous les risques de la fission, fut-elle de 4e ou 5e génération. Le seul chantier en cours actuellement se trouve en France, à Cadarache,
sous le nom d'Iter(13). Nous en avons souvent débattu sur ce site. C'est un honneur pour l'Europe de
l'héberger, mais le site géographique lui-même est-il le mieux choisi ? On notera par ailleurs qu'en mettant davantage de moyens dans la recherche consacrée à la fusion nucléaire et à toutes les
technologies associées, notamment en ce qui concerne les enceintes en métaux spéciaux destinés à confiner les neutrons rapides qui seront produits, les délais du demi-siècle annoncés pour le
réacteur de démonstration Iter pourraient certainement être diminués.
Conclusion. L'Europe doit mettre en place une
Communauté européenne de l'énergie
On considère généralement que la construction de l'Europe ne progresse jamais mieux que dans les crises. L'Union
européenne, dans son cadre juridique et politique actuel, semble avoir atteint un palier difficile à dépasser. Nous pensons que l'accident de Fukushima au Japon, affectant l'énergie nucléaire et
sa gestion dans le monde entier, ouvre une nouvelle période de crise dont le sujet dépasse le seul nucléaire. Il s'agit de l'énergie en général : quels sont les besoins en énergie ? Peut-on les
réduire ? A quelles sources fera-t-on appel pour les satisfaire ? Faudra-t-il laisser aux marchés ou confier aux Etats la responsabilité des politiques industrielles et économiques mises en
oeuvre ?
Si ces questions se posent sur l'ensemble de la planète (notamment au Japon), elles intéressent aussi particulièrement
l'Europe, pauvre en réserves de combustibles fossiles et dont la consommation énergétique par habitant, sans atteindre celle des Etats-Unis, est élevée. Si l'Europe veut diminuer sa dépendance au
charbon et au pétrole, si le recours à l'énergie nucléaire n'est plus considéré comme une solution généralisable, il lui faudra développer les énergies renouvelables et les économies d'énergie.
Mais ceci ne se fera pas sans d'importants investissements et un véritable changement de société, privilégiant la mutualisation et les échanges.
Les défenseurs du souverainisme en tireront argument pour affirmer que ce changement de société sera plus difficile dans un cadre fédéral que dans le cadre des cultures nationales. Les militants
de la construction européenne, dont nous sommes, démontreront au contraire que face aux politiques énergétiques de puissance appliquées par de grands Etats mondiaux, la politique énergétique et
plus généralement la transformation de la société européenne en résultant ne susciteront les efforts nécessaires que par une mobilisation européenne d'ensemble, visant une sorte de quasi économie
de guerre.
Cependant, si la définition et l'application de cette mobilisation étaient confiées aux autorités européennes actuelles, dont on constate tous les jours les limites face aux égoïsmes nationaux et
aux emprises des intérêts économiques non-européens, on pourrait craindre qu'il ne se passe rien. Certains ont proposé de créer une Agence européenne de l'énergie, qui disposerait par traité de
fortes compétences supranationales. Ce serait mieux que rien. Mais nous pensons qu'il faudrait aller plus loin, en frappant un grand coup susceptible de marquer les esprits de chacun.
C'est pourquoi nous proposons ici de reprendre une idée qui n'avait pas reçu beaucoup d'échos mais qui nous paraît censée : instituer une véritable Communauté européenne de l'énergie sur le modèle de l'ancienne Communauté européenne du charbon et de l'acier(14) grâce à laquelle la Communauté européenne initiale avait pu expérimenter ses procédures et sa démarche. Dans
le champ de ses compétences, cette Communauté européenne de l'énergie serait dotée d'institutions volontairement parallèles à celles de l'Union européenne, mais plus efficaces, notamment en
matière de représentativité, de démocratie et de prise de décisions.
En fait, il s'agirait, dans son domaine, de la création d'une véritable Europe fédérale de l'énergie. Elle disposerait ainsi de deux assemblées, l'une
représentant l'ensemble de la population, l'autre les Etats et régions, élues au suffrage universel. Le corps électoral élirait également un Président en charge d'un exécutif responsable soit
devant les assemblées, soit devant le corps électoral, sur le mode du pouvoir présidentiel à l'américaine. Les citoyens électeurs, via notamment les partis politiques, seraient responsables en
dernier ressort des choix de société impliqués. La nécessité de faire appel des processus électoraux obligerait ainsi par la force des choses à faire discuter très largement les grands choix
stratégiques. On ne pourrait plus ainsi prétendre que ces choix seraient faits au sein de cercles technocratiques.
Les pouvoirs de la Communauté seraient très étendus, à la hauteur de l'ampleur des questions posées aujourd'hui à l'Europe par la question de l'énergie et de ses utilisations. Leurs
contenus et leur exercice seraient, dans les limites permises par la nécessaire efficacité et continuité des prises de décisions, soumises régulièrement, comme nous venons de le voir, à
l'approbation du corps électoral. Les politiques retenues et leur mise en oeuvre effective seraient également discutées en permanence dans le cadre des réseaux sociaux et de l'Internet.
Les compétences de la Communauté recouvriraient d'abord l'ensemble des responsabilités de gestion des sources de production
et des réseaux de distribution actuellement assurées par divers organismes publics ou privés au sein de l'Union européenne, en premier lieu les opérateurs et exploitants électriciens et gaziers.
Ceux-ci seraient re-nationalisés à 100% et par ailleurs soumis à des contrôles techniques et de gestion indépendants tant des Etats que des intérêts industriels impliqués. Ces contrôles seraient
particulièrement poussés en ce qui concerne les réacteurs nucléaires gérés par ces organismes, ou les opérations de démantèlement décidées.
Nous avons vu dans la présente note que les solutions énergétiques d'avenir, entraînant de véritables changements de société, y compris en terme de centralisation des décisions, concerneront le
développement des énergies nouvelles et corrélativement, celui des économies d'énergies. On pourrait penser qu'il serait alors contradictoire d'en confier l'impulsion d'ensemble à un organisme
central, fut-il élu et fédéral. Mais les politiques correspondantes exigeront la mobilisation de beaucoup de crédits publics et d'épargnes privées locales. Dans cet objectif, nous suggérerions de
reprendre et spécialiser le projet de fonds européen d'investissement stratégique présenté dans nos contributions précédentes. Ces politiques demanderont aussi la mise en place de régulations
d'ordre public en matières de tarification, de fiscalité, de protection aux frontières, de normes techniques... Tout ceci ne serait pas concevable en dehors d'une autorité européenne unique,
ayant à la fois compétence technique, réglementaire et diplomatique.
En ce qui concernera l'avenir, un très important effort de recherche/développement impliquant un grand nombre
d'universités, d'organismes publics (tel le CEA en France) et d'entreprises sera nécessaire. Sa coordination devra être assurée au sein de programmes européens spécifiques (beaucoup plus
exigeants que ceux relevant actuellement de la recherche européenne financée par la Commission). Des budgets publics communs considérables devront y être affectés. Ce sera dans le cadre de ces
actions que devront être financés et décidés les travaux intéressant la fusion et le cas échéant, les 4e et 5 générations de centrales nucléaires civiles - sans exclure la recherche sur des
solutions jusqu'à présent délaissées, celle par exemple des réacteurs à fluorure de thorium liquide(15).
Les compétences fédérales de la future Communauté européenne de l'énergie devraient aussi être étendues aux domaines régaliens de la sécurité, de la défense et de la négociation diplomatique avec
les puissances extra-européennes. Si les organes de la future Communauté ne se substituaient pas entièrement à ceux en charge de ces questions dans les Etats-membres ou dans l'actuelle Union
européenne, ils devraient tout au moins être étroitement coordonnées avec ces derniers.
On remarquera que nous n'abordons pas ici la question clé de l'avenir du nucléaire en Europe, particulièrement en France
qui en a fait la source essentielle de production de son énergie électrique. Dans l'esprit de cette note, il s'agirait en effet de questions à traiter dans la cadre des compétences de la
Communauté européenne de l'énergie proposée. Notre avis personnel sur la question, en l'absence d'une telle institution, n'aurait guère d'intérêt ici. Nous y reviendrons ultérieurement dans un
autre cadre.
Ajoutons que l'exemple donné par l'Europe, grâce à la mise en place et au fonctionnement de la Communauté européenne de
l'énergie proposée ici, pourrait provoquer une émulation dans tous les grands pays soucieux eux-aussi de traiter en priorité leur avenir énergétique. Des consensus sur les grandes questions
conditionnant l'avenir de la planète et en tous cas celui de l'humanité pourraient peut-être en découler.
***
Les propositions ci-dessus seront certainement accueillies avec le plus grand scepticisme. Comment, sur le plan de la
pratique institutionnelle et politique, la Communauté de l'énergie envisagée ici, pourrait-elle coexister avec l'Union européenne ? Les zones de recouvrement de compétences, sinon de conflits,
seront en effet nombreuses. Pourra-t-on compter sur le corps électoral pour les résoudre ?
Plus généralement, comment le maquis inextricable des intérêts nationalistes, corporatifs, technologiques, économiques et
oligarchiques caractérisant le domaine de l'énergie en Europe pourrait-il tolérer une réforme constitutionnelle ayant pour premier objectif de diminuer les pouvoirs en place ?
Observons seulement que si rien n'était fait, nous pourrions dire adieu à l'avenir même des sociétés européennes. On constatera à nouveau qu'en toutes hypothèses, l'énergie la plus sûre sera celle que l'on économisera.
Notes
(1) Référence. Jean-Paul Baquiast. «Le paradoxe du Sapiens», Editions
JP. Bayol, 2010
(2) Chronologiquement, c'est la fission des atomes de métaux hyperlourds naturellement instables tels que le radium et l'uranium qui a été maîtrisée la première. La
fusion demandant beaucoup plus d'énergie extérieure a été entreprise ensuite. Elle est loin d'être encore maîtrisée, sauf dans les coeurs de bombes nucléaires ou en laboratoire dans de très
petits volumes assurant le confinement et la pression nécessaire.
(3) Laurence C. Smith, «The World in 2050», Dutton, 2010.
(4) Dont Martin Rees (http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2003/avr/rees.html), James Lovelock (http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2009/mar/lovelock.html ) et Jacques Blamont (http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2004/sep/blamont.html), dont nous avions présenté les travaux.
(5) Interview de C. De Duve : http://www.newscientist.com/article/mg20928015.400-biology-nobelist-natural-selection-will-destroy-us.html
(6)Voir le livre d'Hervé Kempf, «L'oligarchie c'est fini » qui résume bien cette question déterminante des oligarchies prenant en mains l'évolution de l'ensemble
de la planète (http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2011/mar/kempf.html)
(7)Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Ressources_et_consommation_%C3%A9nerg%C3%A9tiques_mondiales.Voir aussi
l'OCDE : http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/433/_C9nergie_mondiale_.html
(8) L'Agence internationale des énergies renouvelables (Irena, http://www.irena.org/) a été créée au sein de l'Onu en janvier 2009,
sur une initiative allemande. Elle compte quelque 75 membres. Elle vient de tenir sa première assemblée générale les 4 et 5 avril à Abou Dhabi. Lieu de nombreuses tensions, elle a été en effet
récupérée par l'émirat pétrolier, avec l'appui des Etats-Unis et de la France, ce qui compromet sa légitimité. L'Allemagne y reste présente, par le Centre d'innovation et de technologie implanté
à Bonn.
(9) Voir notre article : Gaz et huile de schiste, catastrophe
environnementale annoncée ?
(10) On étudiera le scénario présenté par l'association NegaWatt qui insiste à juste titre non seulement sur l'appel aux énergies renouvelables, mais aussi sur les
économies d'énergie, sous la double forme de la sobriété énergétique et de l'efficacité énergétique. Mais telles qu'exposées par cette association, ces différentes solutions ne semblent
accessibles dans l'immédiat qu'à des pays ayant déjà une forte expérience industrielle et citoyenne, au rang desquels en Europe l'Allemagne et les pays scandinaves. NegaWatt http://www.negawatt.org/.
(11) Fait significatif, en avril 2011, fla Grande Bretagne vient de proposer à la France d'étudier une mise en commun des forces nucléaires stratégiques des deux
pays. Cela est présenté sous l'angle des économies d'échelle. Mais on notera qu'aucun des deux pays n'envisagerait pour cette raison de renoncer à leur force de frappe.
(12) Signalons à cet égard le calcul de Paul Jorion (http://www.pauljorion.com/blog/) :
"J’ai proposé à la discussion la question suivante; Quelle est la probabilité durant une année quelconque qu’il y ait un accident nucléaire majeur, connaissant
la probabilité d’accident majeur par réacteur et le nombre de réacteurs en service ?
Comme je n’ai plus fait de combinatoire depuis longtemps, je demandais aux commentateurs de me corriger si nécessaire. L'un d'eux m’assure que ma formule est correcte, je la reproduis donc
ici.
· R = risque d’accident majeur durant une année x
· p = probabilité d’accident sur une année pour un réacteur
· n = nombre de réacteurs
R(n) = 1 – (1-p)^n
Disons que le risque pour un réacteur est d’un accident majeur tous les cinq mille ans. S’il n’y a qu’un réacteur au monde, le risque d’un accident majeur pour une année x est de 0,2 %o. Si j’ai
443 réacteurs en service dans le monde – ce qui est apparemment le cas aujourd’hui – quel est le risque d’un accident majeur sur une année, et par exemple, sur l’année en cours ?
R(443) = 1 – (0,9998)^443 = 8,48 %
On voit donc que même avec une probabilité d’accident qui paraît extrêmement faible : un accident seulement tous les 5 000 ans pour un réacteur, on débouche pourtant sur une probabilité
de 8,48 % d’accidents majeurs par an si l’on a 443 réacteurs en service, c’est-à-dire un niveau très loin d’être négligeable."
(13) Iter : http://www.iter.org
(14) CECA : http://fr.wikipedia.org/wiki/Communaut%C3%A9_europ%C3%A9enne_du_charbon
_et_de_l%27acier
(15) sur les RFTL ou LFRT, voir http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2011/117/thorium.htm
Post-scriptum au 13/04/2011
* Voir un article précédent de Alain Granjean signalé par un lecteur http://alaingrandjean.fr/2011/03/29/l%E2%80%99equation-climat-energie-apres-la-catastrophe-nucleaire-de-fukushima/
* Vois aussi le site Manicore du très médiatique Jean-Marc Jancovici http://www.manicore.com/